Kellé vous guide vers l'art à Paris

?>

Actualité – Diego Velasquez au grand palais

La grande exposition Vélasquez a donc finalement lieu au Grand Palais et non au musée du Louvre comme cela était prévu initialement. Le président de cette honorable Institution, Jean-Luc Martinez souhaite y présenter des expositions temporaires en liaison avec les collections permanentes. Or, le Louvre ne possède aucun tableau du grand maître espagnol. Ainsi, l’exposition Vélasquez est remplacée par 2 autres expositions, l’une consacrée à Valentin de Boulogne, l’autre à Nicolas Poussin dont le musée possède un ensemble très riche.

Même si les tableaux de Vélasquez ne seront pas exposés sur les cimaises du Louvre, il m’a semblé indispensable de rappeler dans cette lettre, à la veille de l’ouverture au Grand Palais de cette première rétrospective en France, le rôle majeur joué par le musée du Louvre dans la connaissance en France de la peinture espagnole, celle du Siècle d’or (XVIIème siècle).

Remontons le temps et arrêtons nous dans la 2ème partie du XVIIIème siècle : l’école espagnole est peu connue. Un fait révélateur : dans la grande Encyclopédie de Diderot, 8 écoles de peinture en Europe sont citées, aucune n’est espagnole. Le peintre Bartolomé Estaban Murillo était cependant connu sur le marché de l’art, 5 toiles figuraient dans les collections du Museum français (futur musée du Louvre) à son ouverture en août 1789.

C’est dans notre pays, qui ne jurait encore que par le Néoclassicisme et par Raphael que le roi Louis-Philippe va introduire un courant intellectuel nouveau dans la décennie 1830-1840.

Louis-Philippe devient roi des Français en 1830 à la suite des journées des Trois Glorieuses qui voient la chute du régime de Charles X.

Louis-Philippe est un ardent hispanophile : il a visité l’Espagne, voyagé en Amérique latine, épousé Marie-Amélie de Bourbon Sicile, cousine du roi d’Espagne, Ferdinand VII.

Son souhait : constituer une collection unique en son genre, une collection de peinture espagnole toute nouvelle pour le musée parisien.

C’est une décision politique qui traduit sa volonté de renouer le dialogue avec la monarchie espagnole après les désastres de l’occupation française (pensons au tableau de Goya : Tres de Mayo ).

La restitution des pillages napoléoniens a permis de constituer une collection d’art espagnol au musée du Prado qui a ouvert ses portes en 1819 (musée Royal)

Mais un événement va permettre à Louis-Philippe d’atteindre son objectif : la décision du gouvernement espagnol à partir de 1835 de séculariser les congrégations religieuses, monastères et couvents ce qui va générer un afflux d’oeuvres d’art sur le marché espagnol.

Dès 1835 le roi de France charge le baron Taylor, homme de lettre, grand voyageur, d’une mission artistique en Espagne. Trois ans plus tard, en 1838, après une campagne médiatique importante soulignant que le roi a acquis les œuvres sur ses fonds personnels, est inaugurée au Louvre, la « Galerie espagnole » : plus de 400 tableaux sont exposés dans 5 salles : de nombreux tableaux de Ribera, de Murillo, plus de 80 tableaux de Zurbaran, des tableaux du Greco, de Goya. Les tableaux de Vélasquez sont peu nombreux car il s’agit souvent de tableaux de cour qui se trouvaient dans les collections royales espagnoles et moins disponibles sur le marché. Seul le Portrait du Comte-duc d’Olivarès (collection particulière) offrait un aspect valable de l’art du grand peintre.

Ainsi le public découvre un art expressif, dramatique, à forte composante mystique et spirituelle, aux aspects techniques novateurs, un art très différent de l’art classique français et italien.

La renommée du musée Louis-Philippe dépassera les frontières : en 1842 le nombre de tableaux espagnols au Louvre est supérieur à celui du musée du Prado !

Mais les évènements politiques auront raison de cette magnifique Galerie : la Révolution de 1848 entraîne la chute du régime et l’exil du roi, la République lui restitue sa collection, le roi meurt 3 ans après, sa collection est dispersée lors de ventes aux enchères et enrichit les collections nationales des musées d’Europe……

L’impact de la Galerie espagnole sur l’art de l’époque en France sera majeur : Baudelaire écrivait déjà en 1846 : « Le musée espagnol est venu augmenter le volume des idées générales que vous devez posséder sur l’art ».

Elle va marquer de nombreux artistes dont Delacroix, Jean-François Millet, Gustave Courbet, Degas, Manet   et occasionner de nombreux voyages des artistes en Espagne. Ainsi comme l’écrit Gary Tinterow (Conservateur au Metropolitan de New York) « Le voyage en Italie n’était plus un passage obligé, l’Espagne était devenu la source du goût ».

Aujourd’hui la collection de peinture espagnole du Louvre est réduite à environ 10 œuvres (Murillo, le jeune mendiant, la naissance de la Vierge…) mais il existe en France de nombreux tableaux espagnols dans les musées de Province (musée de Rouen, Démocrite de Vélasquez, musée de Lyon, Saint François de Zurbaran, que nous admirerons peut-être à l’exposition du Grand Palais.

J’espère avoir le plaisir de vous retrouver pour partager avec vous des instants de Beauté espagnols !

diego1 diego2

diego3

Comments are closed.